jeudi, décembre 22, 2005

La claque

Le gouvernement voulait imposer une loi répressive et, contre toute attente, c'est finalement... la légalisation des échanges de fichiers qui sort du débat à l'Assemblée sur le fameux projet de loi Droit d'Auteur et les Droits Voisins dans la Société de l'Information (DADVSI). Le plus rigolo dans l'histoire, c'est que même les députés de la majorité se sont opposés à ce texte.
Bref, des amendements ont finalement complètement dénaturé le projet de loi : les téléchargements réalisés via les réseaux peer-to-peer sont considérés comme un acte de copie privée. «A condition que ces reproductions fassent l'objet d'une rémunération» , précise le principal correctif, faisant allusion à l'idée d'une sorte de forfait mensuel baptisé "licence globale optionnelle". Une idée originale, et en tout cas plus équilibrée que la rémunération que tout le monde paie aux sociétés de droits d'auteur en achetant un baladeur, un CD ou un DVD vierge.
Mais attention. La loi n'est pas enterrée pour autant. D'abord, les amendements qui légitiment les échanges en peer-to-peer devront prendre place dans le cadre de la loi, même si celle-ci est devenue de fait moins répressive. Ensuite, rien ne dit que ces amendements seront définitivement adoptés : le gouvernement a en effet décidé de programmer un nouveau débat sur le sujet et un nouveau vote, qui pourrait être moins favorable si les industriels et les groupes de pression réussissent à convaincre et à mobiliser la majorité des députés. Cela étant, le texte final sera soumis au Sénat, qui semble plus ouvert aux arguments en faveur de la licence globale.
Il a quand même fallu la mobilisation de nombreux acteurs pour remettre en cause ce projet de loi largement soutenu par les industriels de la musique. On a même vu des commerciaux de Virgin venus dans l'hémicycle distribuer gracieusement des bons d'achats au députés !
On retiendra peut-être que nos représentants ne sont pas si malléables.
En attendant, ce débat a permis d'en savoir un peu plus sur les compétences de ceux qui prétendent légiférer en la matière. On a entendu un ministre complètement à côté de la plaque, contraint de se réfugier dans les grands principes de la liberté de création, et des députés incapables de comprendre pourquoi le texte menaçait les logiciels libres, la copie privée et, plus simplement, la liberté des consommateurs.
Pour mieux juger, consultez donc les questions-réponses sur ce sujet, publiées par le ministère de la culture. "Contourner un système anti-copie, c’est comme démonter une alarme dans un magasin de disques et de vidéos où l’on voudrait voler des CD ou des DVD", peut-on notamment y lire : les rédacteurs n'ont évidemment pas imaginé les problèmes techniques qui surviennent quand on veut écouter un fichier WMA ou voir une vidéo en WMV sur un ordinateur équipé d'autre chose que de Windows. Et le pire, c'est que le ministre lui-même prétend que le projet de loi est un moyen de lutter contre le monopole des "grands groupes américains".
Continuons. "Aujourd’hui, les baladeurs ne sont pas tous compatibles, poursuit le ministère. Cette situation n’est pas unique : sur les consoles de jeu, on ne joue pas à un jeu pour PS2 sur Xbox ou vice-versa.
Dans le domaine des mesures techniques, il est possible de résoudre ce problème d’interopérabilité en rendant les lecteurs compatibles avec les différents formats. Le projet de loi prévoit une disposition visant à accélérer cette évolution".
Ben voyons. On imagine Sony fournissant gratuitement la licence Atrac3 à Apple, et Apple abandonnant son format protégé pour se convertir au WMA... avec la bénédiction de Microsoft. Quelle naïveté.

1 Commentaires:

Anonymous Anonyme a écrit...

Comme quoi, la democratie ça existe. Mais j'ai plutot l'impression que les hommes politiques ont tremblé en imaginant que leurs enfants risquaient d'aller en prison...


JeFF

22 décembre, 2005 19:31  

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